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Georges Simenon. Maigret et le voleur paresseux

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Разработка посвящена жизни и творчеству Жоржа Сименона, франкоязычного писателя бельгийского происхождения, и его роману "Мегре и ленивый вор" 

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«Georges Simenon. Maigret et le voleur paresseux»

Georges Simenon. Maigret et le voleur paresseux

I. Lisez le texte et répondez aux questions:


1. Qui est Georges Simenon?

2. Dans quelle famille est-il né?

3. Quand a-t-il commencé sa carrière de journaliste ? 

4. Quels ouvrages a-t-il écrits?

5. Quel est son personnage emblématique ?

6. Qu’est-ce qui nourrissait ses publications?

7. Quelle était la fin de sa vie ?

8. Qu’est-ce qui prouve sa fécondité exceptionnelle ?

9. Qui étaient parmi les premiers hommes de lettres à le reconnaître comme un grand écrivain ?

Georges Simenon

Georges Simenon est un écrivain belge francophone  d’une fécondité exceptionnelle : on lui doit cent quatre-vingt-treizeromans, cent cinquante-huit nouvelles, plusieurs œuvres autobiographiques et de nombreux articles et reportages publiés sous son propre nom, ainsi que cent soixante-seize romans, des dizaines de nouvelles, contes galants et articles parus sous vingt-sept pseudonymes. Il est l'auteur belge le plus lu dans le monde.

Il est né à Liège (Belgique) le13 février (vendredi) 1903. Il est le premier fils de Désiré Simenon, comptable dans un bureau d’assurances et fils d'un chapelier, et d’Henriette Brüll, employée dans un magasin.

Allergique à la discipline, il quitte les bancs de l’école à 15 ans et débute, un an plus tard, sa carrière de journaliste. 

Il commence, en janvier 1919, à la Gazette de Liègepour la rubrique des faits divers, également appelée «chiens écrasés». Cette expérience lui permettra d’alimenter son imagination de futur auteur de romans policiers. 

En 1920, il écrit son premier ouvrage, Au pont des Arches, qui décrit avec humour les mœurs liégeoises. Deux ans plus tard, il part pour Paris et se lance dans la rédaction de nouvelles et de contes, qui sont publiés par différents journaux comme Le Matin mais aussi des parutions plus légères comme Frou-Frou ou Paris- Flirt.

En 1930, il crée le personnage du commissaire Maigret, qui le rendra célèbre dans le monde entier. Très rapidement, un an plus tard, il commence à travailler avec Jean Renoir sur les adaptations cinématographiques de plusieurs de ses parutions : La nuit du Carrefour et Le Chien Jaune... Tous deux écrits la même année ! 

Georges Simenon parcourt le globe et n’a de cesse d’enrichir son imagination. Ses talents d’auteurs seront également reconnus et récompensés aux États-Unis, où il résidera, ainsi qu’au Québec de 1945 à 1955. Il sera même élu président de l’association des Mystery Writers of America. 

En 1972, il écrit son dernier roman, Maigret et M. Charles

Après le suicide de sa fille Marie-Jo, en 1978, il se retire peu à peu du devant de la scène. Il se consacre à la rédaction de ses Mémoires Intimes. Pendant cette période, il est célébré partout, à la télévision, dans les magazines, lors de colloques, d’expositions. Plusieurs rues sont rebaptisées en son honneur.

Georges Simenon s’éteint à Lausanne, en Suisse, le 4 septembre 1989.

Les tirages cumulés de ses livres atteignent 550 millions d’exemplaires. Georges Simenon est, selon l'Index Translationum de l'UNESCO de 2013, le dix-septième auteur toutes nationalités confondues, le troisième auteur de langue française après Jules Verne et Alexandre Dumas, et l'auteur belge le plus traduit dans le monde (3 500 traductions en 47 langues).

André Gide, André Thérive et Robert Brasillach sont parmi les premiers hommes de lettres à le reconnaître comme un grand écrivain. André Gide, fasciné par la créativité de Georges Simenon qu'il avait souhaité rencontrer dès son succès policier, le questionna à maintes reprises, échangea une correspondance quasi-hebdomadaire pour poursuivre les méandres créatifs de cet écrivain populaire et prit la surprenante manie d'annoter en marge tous ses romans pour conclure en 1941 : « Simenon est un romancier de génie et le plus vraiment romancier que nous ayons dans notre littérature d'aujourd'hui. » Menant une enquête encore plus intense, mais plus courte en convoquant l'auteur à Darmstadt pour trois jours et nuits de questions ininterrompues, le philosophe allemand Hermann von Keyserling déclarait péremptoirement : « C'est un imbécile de génie. »

II. Lisez le résumé et répondez aux questions:



1. Où et quand se déroule l’action de ce roman ?

2. Quel est le sujet du roman ?

3. Quels sont les problèmes essentiels qui y sont soulevés ?

4. Nommez les personnages du roman.

5. Quelle est l’idée principale ?


L'intrigue se déroule en France, à Paris. Une nuit, un homme est découvert, le crâne défoncé, au Bois de Boulogne. Le Parquet trouve sur les lieux Maigret que l'inspecteur Fumel, du XVIe arrondissement, a cru bon d'appeler, mais ces messieurs laissent entendre au commissaire qu'il a d'autres tâches à accomplir en un temps où les hold-up se multiplient. Maigret va devoir mener ces deux enquêtes de front.

Une nuit, un homme est découvert, le crâne défoncé, au Bois de Boulogne. Le Parquet trouve sur les lieux Maigret que l'inspecteur Fumel, du XVIe arrondissement, a cru bon d'appeler, mais ces messieurs laissent entendre au commissaire qu'il a d'autres tâches à accomplir en un temps où les hold-up se multiplient. Vexé mais non découragé, Maigret, qui a cru reconnaître la victime, se fait confirmer par les fiches de l'Identité judiciaire qu'il s'agit d'Honoré Cuendet, un ancien de la Légion étrangère, déjà condamné pour vols ; sa mère habite rue Mouffetard. Intrigué, Maigret va questionner la vieille. Elle ne voyait son fils que de loin en loin et ignore sa fin tragique ; il subvenait à ses besoins. Par des recoupements divers, Maigret va s'intéresser à la personnalité de ce Cuendet, un voleur pas comme les autres, circonspect, peu remuant et qui avait pour technique de ne s'introduire que dans des maisons riches, lorsque les occupants s'y trouvaient. L'affaire du Bois de Boulogne vient à peine de démarrer qu'un hold-up commis en plein jour dans la rue La Fayette met en branle Maigret et ses limiers. Un des gangsters a été abattu, ses deux complices, qui ont fui avec le produit du vol, sont recherchés activement. L'un d'eux, par l'identification du mort, est repéré et, grâce à une enquête serrée où les souvenirs de Maigret le servent presque autant que son flair, on remonte au cerveau de la bande, en la personne de Fernand, « un ancien » sorti de prison, qui s'est réfugié dans une villa de Corbeil. Un réseau de filatures se terminera par un coup de filet magistralement synchronisé. Cependant Maigret ne s'est pas détourné de l'affaire du Bois de Boulogne. Les recherches de Fumel ont permis de retrouver la chambre d'hôtel où Cuendet a vécu les cinq dernières semaines : c'est de là, selon les dires d'une voisine de palier, qu'il a surveillé les allées et venues d'un immeuble cossu du Marais. Or, le propriétaire de cet hôtel particulier, Stuart Wilton, y a installé sa troisième épouse dont il a divorcé et qui est devenue la maîtresse de son fils. C'est là qu'une nuit Cuendet a pénétré et a été surpris par le fils Wilton : on l'a assommé avec un objet lourd. Pas question d'appeler la police, sans que Stuart Wilton ne soit mis fâcheusement au courant. Alors – et l'enquête l'avait déjà établi – le corps du voleur tué a été transporté. Sur ses vêtements, quelques poils de chat sauvage ont été retrouvés. Et, justement, le fils Wilton, dans sa voiture de grand sport, avait une couverture en chat sauvage, très remarquée et qui a disparu. Mais le juge d'instruction reste sceptique. Maigret l'avait prévu ; et d'ailleurs, il s'en fiche: l'important, c'est que la mère de Cuendet soit dorénavant à l'abri du besoin, puisque son fils avait pensé à elle et lui a légué ce qu'il a gagné pendant ses années de cambriolage.

Personnages
  • Honoré Cuendet,

  • Suisse (Vaudois), la victime. Bricoleur qui vit des cambriolages. Célibataire. 50 ans.

  • Justine Cuendet, mère d’Honoré Cuendet, Suisse

  • Stuart Wilton, riche Anglais, grand ami de la France où il vit habituellement, proche de 70 ans

  • Florence Lenoir, ex-épouse de Wilton dont elle continue à porter le nom

  • Le fils Wilton, play-boy divorcé, amant de Florence

  • Aristide Fumel, inspecteur de police

  • Le juge Cajou.

III. Lisez le fragment du roman et répondez aux questions:


1. Où et quand se déroule l’action de ce fragment?

2. Quels sont les problèmes qui y sont soulevés ?

3. Dégagez le leitmotiv de ce fragment.

4. Composez les questions sur le contenu de cet extrait et répondez à ces questions.

5. Dressez le plan du fragment.

6. En quoi consistait la réorganisation de la police ?

7. Quels sentiments éprouvait Maigret tout au long du fragment ?

8. Donnez la caractéristique du commissaire.

9. Quels détails ou faits ont une grande valeur dans la narration ?

10.Que pensez-vous, en général, de cet extrait du texte ?



Maigret et le voleur paresseux



Chapitre 1

Il y eut un vacarme pas loin de sa tête et Maigret se mit à remuer, maussade, comme effrayé, un de ses bras battant l'air en dehors des draps. Il avait conscience d'être dans son lit, conscience aussi de la présence de sa femme qui, mieux éveillée que lui, attendait dans l'obscurité sans rien oser dire.

Sur quoi il se trompait — pendant quelques secondes tout au moins — c'était sur la nature de ce bruit insistant, agressif, impérieux. Et c'était toujours en hiver, par temps très froid, qu'il se trompait de la sorte.

Il lui semblait que c'était le réveille-matin qui sonnait, alors que depuis son mariage, il n'y en avait plus sur sa table de nuit. Cela remontait à plus loin encore que l'adolescence : à son enfance, quand il était enfant de chœur et servait la messe de six heures.

Pourtant, il avait servi la même messe au printemps, en été, en automne. Pourquoi le souvenir qui lui en restait et qui lui revenait automatiquement était-il un souvenir d'obscurité, de gel, de doigts engourdis, de chaussures qui, sur le chemin, faisaient craquer une pellicule de glace ?

Il renversait son verre, comme cela lui arrivait souvent, et Mme Maigret allumait la lampe de chevet au moment où sa main atteignait le téléphone.

— Maigret... Oui...

Il était quatre heures dix et le silence, dehors, était le silence particulier aux plus froides nuits d'hiver.

— Ici Fumel, monsieur le commissaire...

— Comment ?

Il entendait mal. On aurait dit que son correspondant parlait à travers un mouchoir.

— Fumel, du XVIe...

L'homme étouffait sa voix comme s'il craignait d'être entendu par quelqu'un se trouvant dans une pièce voisine. Devant l'absence de réaction du commissaire, il ajoutait :

— Aristide...

Aristide Fumel, bon ! Maigret était éveillé, à présent, et se demandait pourquoi diable l'inspecteur Fumel, du XVIe arrondissement, l'éveillait à quatre heures du matin.

Et pourquoi, en outre, sa voix sonnait-elle mystérieuse, comme furtive ?

— Je ne sais pas si je fais bien de vous téléphoner... J'ai tout de suite averti mon chef direct, le commissaire de police... Il m'a dit d'appeler le Parquet et j'ai eu le substitut de garde au bout du fil...

Mme Maigret qui, pourtant, n'entendait que les répliques de son mari, se levait déjà, cherchait ses pantoufles du bout du pied, s'enveloppait de sa robe de chambre ouatinée et se dirigeait vers la cuisine où on entendait le sifflement du gaz, puis l'eau qui coulait dans la bouilloire.

— On ne sait plus trop ce que l'on doit faire, vous comprenez ? Le substitut m'a ordonné de retourner sur les lieux et de l'attendre. Ce n'est pas moi qui ai découvert le corps, mais deux agents cyclistes...

— Où ?

— Comment ?

— Je demande, où ?

— Au bois de Boulogne... Route des Poteaux... Vous 

connaissez ?... Elle donne dans l'avenue Fortunée, pas loin de la porte Dauphine... Il s'agit d'un homme d'un certain âge... Mon âge à peu près... Pour autant que j'aie pu en juger, il n'a rien dans les poches, aucun papier... Bien entendu, je n'ai pas bougé le corps... Je ne sais pas pourquoi, il me semble qu'il y a quelque chose de bizarre et j'ai préféré vous téléphoner... Il vaudrait mieux que les gens du Parquet ne le sachent pas...

— Je te remercie, Fumel...

— Je retourne là-bas tout de suite, des fois qu'ils arriveraient plus vite que d'habitude...

— Où es-tu ?

— Au poste de la Faisanderie... Vous comptez venir ?

Maigret hésita, toujours enfoui dans la chaleur du lit.

— Oui.

— Qu'est-ce que vous direz ?

— Je ne sais pas encore. Je trouverai.

Il était humilié, presque furieux, mais ce n'était pas la première fois depuis six mois. Le brave Fumel n'y était pour rien. Mme Maigret, dans l'encadrement de la porte, lui recommandait :

— Habille-toi chaudement. Il gèle dur.

En écartant le rideau, il découvrit des fleurs de givre sur les vitres, Les becs de gaz avaient une luminosité spéciale qu'on ne leur voit que par les grands froids et il n'y avait pas une âme boulevard Richard-Lenoir, pas un bruit, une seule fenêtre éclairée, en face, sans doute dans une chambre de malade.

Maintenant, on les obligeait à tricher ! On, c'était le Parquet, les gens du ministère de l'Intérieur, tous ces nouveaux législateurs enfin, sortis des grandes écoles, qui s'étaient mis en tête d'organiser le monde selon leurs petites idées.

La police, à leurs yeux, constituait un rouage inférieur, un peu honteux, de la Justice avec une majuscule. Il fallait s'en méfier, la tenir à l'œil, ne lui laisser qu'un rôle subalterne.

Fumel appartenait encore à la vieille époque, comme Janvier, comme Lucas, comme une vingtaine environ des collaborateurs de Maigret, mais les autres s'accommodaient des nouvelles méthodes et des nouveaux règlements, ne pensant qu'à préparer des examens afin de monter plus vite en grade.

Pauvre Fumel qui, lui, n'avait jamais pu monter en grade parce qu'il était incapable d'apprendre l'orthographe et de rédiger un rapport !

Le procureur, ou un de ses substituts, tenait à être le premier averti, le premier sur place, en compagnie d'un juge d'instruction mal éveillé, et ces messieurs donnaient leur avis comme s'ils avaient passé leur vie à découvrir des cadavres et connaissaient mieux que quiconque les criminels.

Quant à la police... On la chargeait de commissions rogatoires...

— Vous ferez telle et telle chose... Vous appréhenderez telle personne et vous me l'amènerez dans mon cabinet...

— Surtout, ne lui posez pas de questions ! Il faut que cela se passe dans les règles...

Il y en avait tant, de règles, le Journal officiel publiait de si nombreux textes parfois contradictoires qu'ils ne s'y retrouvaient pas eux-mêmes, vivaient dans la terreur d'être pris en faute et de donner prise aux protestations des avocats.

Il s'habillait, grognon. Pourquoi, les nuits d'hiver, quand on le réveillait ainsi, le café avait-il un goût particulier ? L'odeur de l'appartement était différente aussi, lui rappelait la maison de ses parents quand il se levait à cinq heures et demie du matin.

— Tu appelles le bureau pour qu'on t'envoie une voiture ?

Non ! S'il arrivait là-bas avec une auto du quai, il risquait qu'on lui réclame des comptes.

— Téléphone à la station de taxis...

On ne lui rembourserait pas la course, à moins que, si meurtre il y avait, il ne découvre l'assassin dans un délai très bref. On ne remboursait plus les taxis qu'en cas de succès. Encore fallait-il prouver qu'on n'aurait pas pu se rendre autrement sur les lieux.

Sa femme lui tendait une grosse écharpe de laine.

— Tu as tes gants ?

Il fouillait les poches de son pardessus.

— Tu ne veux pas manger un morceau ?

Il n'avait pas faim. Il semblait bouder et pourtant, au fond, c'étaient des moments qu'il aimait bien, peut-être ceux qu'il regretterait le plus une fois à la retraite.

Il descendait l'escalier, trouvait un taxi à la porte, avec de la vapeur blanche qui sortait du pot d'échappement.

— Au bois de Boulogne... Vous connaissez la route des Poteaux ?

— Ce serait malheureux que je ne la connaisse pas, après trente-cinq ans de métier...

C'est ainsi, en somme, que les anciens se consolaient de leur vieillissement.

Les banquettes étaient glacées, On ne rencontra que quelques voitures, des autobus vides qui se dirigeaient vers leur tête de ligne. Les premiers bars n'étaient pas encore éclairés. Aux Champs-Élysées, des femmes de ménage nettoyaient les bureaux.

— Encore une fille qui s'est fait descendre ?

— Je ne sais pas... Je ne crois pas...

— Je me disais bien qu'elle n'aurait pas trouvé beaucoup de clients au Bois par un temps pareil.

Sa pipe aussi avait un autre goût. Il enfonçait les mains dans les poches, calculait qu'il y avait au moins trois mois qu'il n'avait rencontré Fumel et qu'il connaissait celui-ci depuis... à peu près depuis sa propre entrée dans la police, à l'époque où il travaillait dans un commissariat de quartier.

Fumel était déjà laid et, déjà, on le plaignait tout en se moquant de lui, d'abord parce que ses parents avaient eu l'idée de l'appeler Aristide, ensuite parce que, malgré son physique, il avait perpétuellement des drames de cœur.

Il s'était marié et sa femme, après un an, était partie sans laisser d'adresse. Il avait remué ciel et terre pour la retrouver. Pendant des années, son signalement avait été dans la poche de tous les policiers et de tous les gendarmes de France et Fumel se précipitait à la morgue chaque fois qu'on repêchait dans la Seine un cadavre de sexe féminin.

C'était passé à l'état de légende.

— On ne m'ôtera pas de la tête qu'il lui est arrivé malheur et que c'est à moi qu'on en voulait...

Un de ses yeux était fixe, plus clair que l'autre, presque transparent, ce qui rendait son regard gênant.

— Je l'aimerai toute ma vie... Et je sais qu'un jour je la retrouverai...

Avait-il encore le même espoir, à cinquante et un ans ? Cela ne l'empêchait pas, périodiquement, de tomber amoureux et le sort continuait à s'acharner sur lui, car chacune de ses aventures entraînait des complications invraisemblables et finissait mal.

On l'avait même, avec toutes les apparences de la raison, accusé de proxénétisme, à cause d'une garce qui se moquait de lui, et il avait évité de justesse d'être rayé des cadres de la police,

Comment s'y prenait-il, si naïf et si maladroit en ce qui le concernait, pour être cependant un des meilleurs inspecteurs de Paris ?

Le taxi franchissait la porte Dauphine, tournait à droite dans le Bois et on apercevait déjà la lueur d'une lampe de poche. Un peu plus tard, on voyait des ombres, au bord d'une allée.

Maigret descendait de voiture, payait la course. Une silhouette s'approchait.

— Vous arrivez avant eux... soupirait Fumel en tapant des pieds sur le sol gelé pour se réchauffer.

Deux vélos étaient appuyés à un arbre. Les agents en pèlerine battaient la semelle, eux aussi, cependant qu'un petit monsieur à chapeau gris perle regardait l'heure à sa montre avec impatience.

— Le docteur Boisrond, de l'état civil...

Maigret serrait la main distraitement, se dirigeait vers une forme sombre, au pied d'un arbre. Fumel braquait la lumière de sa lampe de poche.

— Je crois, monsieur le commissaire, expliquait-il, que vous allez comprendre ce que je veux dire... Pour moi, il y a quelque chose qui cloche...

— Qui l'a découvert ?

— Ces deux agents cyclistes, en faisant leur ronde...

— À quelle heure ?

— Trois heures douze... Ils ont d'abord cru que c'était un sac jeté au bord du chemin...

Par terre, en effet, dans les herbes durcies par le gel, l'homme n'était qu'un tas informe. Il n'était pas étendu de tout son long, mais ramassé sur lui-même, presque roulé en boule, et seule une main sortait de la masse, encore crispée, comme si elle avait tenté de saisir quelque chose.

— De quoi est-il mort ? demanda Maigret au médecin.

— Je n'ai guère osé y toucher avant l'arrivée du Parquet mais, autant que j'en puisse juger, il a eu le crâne fracturé par un ou plusieurs coups portés avec un objet très lourd...

— Le crâne ? insistait le commissaire.

Car, à la lueur de la lampe de poche, il ne voyait en guise de visage que des chairs tuméfiées et sanguinolentes.

— Je ne peux rien affirmer avant l'autopsie, mais je jurerais que ces coups-là ont été donnés après, quand l'homme était mort, tout au moins mourant...

Et Fumel, regardant Maigret dans la demi-obscurité :

— Vous voyez ce que je veux dire, patron ?

Les vêtements étaient de bonne qualité, sans luxe, des vêtements comme en portent par exemple des fonctionnaires ou des retraités.

— Tu dis qu'il n'y a rien dans les poches ?

— J'ai tâté prudemment et n'ai senti aucun objet... Maintenant, regardez autour...

Fumel éclairait le sol autour de la tête et on ne voyait aucune tache de sang.

— Ce n'est pas ici qu'il a été frappé. Le docteur est d'accord, car étant donné ses blessures, il a dû saigner abondamment. On l'a donc apporté dans le Bois, sans doute en voiture. On dirait même, à la façon dont il est recroquevillé sur lui-même, qu'il a été poussé de l'auto sans que ceux qui le transportaient se donnent la peine d'en descendre.

Le bois de Boulogne était silencieux, figé comme un décor de théâtre, avec, de loin en loin, ses lampadaires qui dessinaient un cercle régulier de lumière blanche.

— Attention... Je crois que les voici...

Une auto arrivait de la porte Dauphine, une longue voiture noire qui cherchait son chemin et Fumel agita sa lampe électrique, se précipita vers la portière.

Maigret, fumant sa pipe à petites bouffées, se tenait à l'écart.

— C'est ici, monsieur le substitut... Le commissaire de police, qui a dû se rendre à l'hôpital Cochin pour un constat, sera ici dans quelques minutes...

Maigret avait reconnu le magistrat, un grand maigre, d'une trentaine d'années, très élégant, qui s'appelait Kernavel. Il reconnaissait le juge d'instruction aussi, avec qui il avait rarement eu l'occasion de travailler et qui était en quelque sorte à cheval entre les nouveaux et les anciens : un certain Cajou, brun de poil, d'une quarantaine d'années. Quant au greffier, il se tenait aussi loin que possible du cadavre, comme s'il craignait que le spectacle le fasse vomir.

— Qui... commença le substitut.

Il regardait la silhouette de Maigret et fronçait les sourcils.

— Pardon. Je ne vous avais pas vu tout de suite. Comment se fait-il que vous soyez ici ?

Maigret se contenta d'un geste vague, d'une phrase plus vague encore :

— Un hasard...

Et Kernavel, mécontent, affectait désormais de ne s'adresser qu'à Fumel.

— De quoi s'agit-il au juste ?

— Deux agents cyclistes, en effectuant leur ronde, ont aperçu le corps, il y a un peu plus d'une heure. J'ai alerté le commissaire de police, mais il devait d'abord passer, comme je vous l'ai dit, à l'hôpital Cochin pour un constat urgent et il m'a chargé de prévenir le Parquet. Tout de suite après, j'ai appelé le docteur Boisrond...

Le substitut cherchait le médecin autour de lui.

— Qu'est-ce que vous avez découvert, docteur ?

— Fracture du crâne, probablement fractures multiples...

— Un accident ? Vous ne croyez pas qu'il a été heurté par une voiture ?

— Il a été frappé plusieurs fois, sur la tête d'abord, au visage ensuite, avec un instrument contondant.

— Vous êtes certain, donc, qu'il s'agit d'un meurtre ?

Maigret aurait pu se taire, laisser faire, laisser dire. Il ne s'en avança pas moins d'un pas.

— On gagnerait peut-être du temps en prévenant les spécialistes de l'Identité Judiciaire ?

C'est à Fumel, toujours, que le substitut donna ses instructions.

— Envoyez un des agents téléphoner...

Il était blême de froid. Tout le monde avait froid, autour du corps immobile.

— Un rôdeur ?

— Il n'est pas habillé comme un rôdeur et, par le temps qu'il fait, il n'y en a guère dans le Bois.

— Dévalisé ?

— Pour autant que je sache, il n'y a rien dans ses poches.

— Un homme qui rentrait chez lui et qui a été attaqué ?

— On ne voit pas de sang par terre. Le docteur pense, comme moi, que le crime n'a pas été commis ici.

— Dans ce cas, il s'agit vraisemblablement d'un règlement de comptes.

Le substitut était péremptoire, satisfait d'avoir trouvé une solution adéquate au problème.

— Le crime aura été commis à Montmartre et les truands qui ont fait le coup se sont débarrassés du corps en le jetant ici...

Il se tourna vers Maigret.

— Je ne pense pas, monsieur le commissaire, que ce soit une affaire pour vous. Vous devez avoir d'importantes enquêtes en cours. Au fait ! où en êtes-vous du hold-up du bureau de poste du XIIIe ?

— Nulle part encore.

— Et des précédents hold-up ? Combien en avons-nous eus, rien qu'à Paris, en quinze jours ?

— Cinq.

— C'est le chiffre que j'avais en tête. Aussi suis-je assez surpris de vous trouver ici à vous occuper d'une affaire sans importance.

Ce n'était pas la première fois que Maigret entendait cette chanson-là. Ces messieurs du Parquet étaient effrayés par la vague de criminalité, comme ils disaient, et surtout par les vols spectaculaires qui, ainsi que cela arrive périodiquement, se multipliaient depuis un certain temps.

Cela signifiait qu'une nouvelle bande, un nouveau gang, pour employer le mot cher aux journaux, s'était formé récemment.

— Vous n'avez toujours aucun indice ?

— Aucun.

Ce n'était pas tout à fait vrai. S'il ne possédait pas d'indices à proprement parler, il n'en avait pas moins une théorie qui se tenait et que les faits semblaient confirmer. Mais cela ne regardait personne, surtout pas le Parquet.

— Écoutez, Cajou. Vous allez prendre l'affaire en main. Si vous m'en croyez faites en un fait divers banal, un crime crapuleux et, ma foi, si les mauvais garçons se mettent à se tuer entre eux, tant mieux pour tout le monde. Vous me comprenez ?

Il s'adressait à nouveau à Fumel.

— Vous êtes inspecteur dans le XVIe ?

Fumel acquiesçait de la tête.

— Depuis combien de temps travaillez-vous dans la police ?

— Trente ans... Vingt-neuf exactement...

À Maigret :

— Il est bien noté ?

— C'est un homme qui connaît son métier.

Le substitut entraînait le juge à l'écart et lui parlait à voix basse. Quand les deux hommes revinrent, Cajou semblait un peu embarrassé,

— Eh ! bien, monsieur le commissaire, je vous remercie de vous être dérangé. Je vais rester en rapport avec l'inspecteur Fumel, à qui je donnerai mes instructions, Si, à un moment donné, je juge qu'il a besoin d'aide, je vous enverrai des commissions rogatoires ou je vous convoquerai à mon cabinet. Vous avez une tâche trop importante et trop urgente à accomplir pour que je vous retienne plus longtemps.

Ce n'était pas seulement de froid que Maigret était pâle et il serra si fort sa pipe entre ses dents qu'il y eut un léger craquement de l'ébonite.

— Messieurs... prononça-t-il comme pour prendre congé.

— Vous avez un moyen de transport ?

— Je trouverai un taxi à la porte Dauphine.

Le substitut hésita, faillit proposer de l'y conduire, mais déjà le commissaire s'éloignait après un petit salut de la main à l'adresse de Fumel.

Pourtant, une demi-heure plus tard, Maigret aurait sans doute pu leur en apprendre assez long sur le mort. Il n'en était pas encore sûr et c'est pourquoi il n'avait rien dit.

Dès l'instant où il s'était penché sur le corps, il avait eu une impression de déjà vu, Le visage avait beau avoir été réduit en bouillie, le commissaire aurait juré qu'il l'avait reconnu.

Il n'avait besoin que d'une petite preuve, que l'on découvrirait en déshabillant le cadavre.

Il est vrai que, s'il avait raison, on arriverait au même résultat par les empreintes digitales.

Il trouva, au stationnement, le même taxi qui l'avait amené.

— Déjà fini ?

— Chez moi, boulevard Richard-Lenoir.

— Compris. N'empêche que, pour du travail rapide... Qui est-ce ?

Un bar était ouvert, place de la République, et Maigret faillit faire arrêter la voilure pour y prendre un verre de n'importe quoi. Il ne le fit pas, par une sorte de pudeur.

Sa femme, qui s'était recouchée, ne l'entendit pas moins monter l'escalier et lui ouvrit la porte. Elle aussi s'étonna :

— Déjà ?

Puis, tout de suite après, d'une voix inquiète :

— Que se passe-t-il ?

— Rien. Ces messieurs n'ont pas besoin de moi.

Il lui en parlait le moins possible. C'était rare que, chez lui, il évoque les affaires du Quai des Orfèvres.

— Tu n'as pas mangé ?

— Non.

— Je vais préparer ton petit déjeuner. Tu devrais vite prendre un bain pour te réchauffer.

Il n'avait plus froid. Sa colère avait fait place à de la mélancolie.

Il n'était pas le seul, à la P. J., à se sentir découragé, et le directeur avait parlé deux fois de donner sa démission. Il n'aurait pas l'occasion d'en reparler une troisième, car il était question de le remplacer.

On réorganisait, comme on disait. Des jeunes gens instruits, bien élevés, issus des meilleures familles de la République, étudiaient toutes les questions dans le silence de leur bureau, en quête d'efficacité. De leurs savantes cogitations, il sortait des plans mirifiques qui se traduisaient, chaque semaine, par de nouveaux règlements.

Et, d'abord, la police devait être un instrument au service de la justice. Un instrument. Or, un instrument n'a pas de tête.

C'était le juge, de son cabinet, le procureur, de son bureau prestigieux, qui menaient l'enquête et donnaient des ordres.

Encore, pour exécuter ces ordres, ne voulait-on plus de policiers à l'ancienne mode, de ces vieilles « chaussettes à clous » qui, comme Aristide Fumel, ne savaient pas toujours l'orthographe.

Que faire, lorsqu'il s'agissait surtout de remplir des paperasses, de ces gens qui avaient appris leur métier dans la rue, passant de la voie publique aux grands magasins et aux gares, connaissant chaque bistrot de leur quartier, chaque mauvais garçon, chaque fille, et capables, à l'occasion, de discuter le coup avec eux en parlant leur langage ?

Il leur fallait maintenant des diplômes, des examens à chaque étape de leur carrière et, quand il avait à commander une planque, Maigret ne pouvait compter que sur les quelques anciens de son équipe.

On ne l'évinçait pas encore. On patientait, sachant qu'il n'était qu'à deux ans de la retraite,

On n'en commençait pas moins à surveiller ses faits et gestes.

Il ne faisait pas jour et il prenait son petit déjeuner tandis que des fenêtres de plus en plus nombreuses s'éclairaient aux maisons d'en face. À cause de ce coup de téléphone, il était en avance, un peu engourdi, comme quand on n'a pas assez dormi.

— Fumel, ce n'est pas celui qui louche ?

— Oui.

— Et dont la femme est partie ?

— Oui.

— On ne l'a jamais retrouvée ?

— Il paraît qu'elle est mariée, en Amérique du Sud, et qu'elle a une ribambelle d'enfants.

— Il le sait ?

— À quoi bon ?

Au bureau aussi, il arriva en avance et, bien que le jour fût enfin levé, il dut allumer sa lampe à abat-jour vert.

— Donnez-moi la permanence de la Faisanderie, s'il vous plaît...

C'était lui qui avait tort. Il ne voulait pas devenir sentimental.

— Allô !... L'inspecteur Fumel est-il là ?... Comment ?... Il rédige son rapport ?

Toujours du papier, des formulaires, du temps perdu.

— C'est toi, Fumel ?

Celui-ci parlait à nouveau d'une voix feutrée, comme s'il téléphonait en cachette.

— L'Identité Judiciaire a terminé son travail ?

— Oui, Ils sont partis il y a une heure.

— Le médecin légiste est venu sur place ?

— Oui. Le nouveau.

Car il y avait un nouveau médecin légiste aussi. Le vieux docteur Paul, qui pratiquait encore des autopsies à soixante-seize ans, était mort et avait été remplacé par un certain Lamalle.

— Qu'est-ce qu'il dit ?

— Comme son confrère. L'homme n'a pas été tué sur place. Il n'y a pas de doute qu'il y ait eu une forte hémorragie. Les derniers coups au visage ont été portés alors que la victime était morte.

— On l'a déshabillé ?

— En partie.

— Tu n'as pas remarqué un tatouage au bras gauche ?

— Comment le savez-vous ?

— Un poisson ?... Une sorte d'hippocampe ?

— Oui...

— On a relevé les empreintes digitales ?

— À l'heure qu'il est, on s'en occupe aux Fichiers.

— Le corps est à l'institut médico-légal ?

— Oui... Vous savez... J'étais très ennuyé, tout à l'heure... Je le suis encore. Mais je n'ai pas osé...

— Tu peux déjà écrire dans ton rapport que, selon toutes probabilités, la victime est un certain Honoré Cuendet, d'origine suisse, un Vaudois qui a passé jadis cinq ans dans la Légion Etrangère...

— Le nom me dit quelque chose... Vous savez où il habitait ?

— Non. Mais je sais où sa mère habite, si elle vit encore. Je préférerais être le premier à lui parler.

— Ils le sauront.

— Cela m'est égal. Note toujours l'adresse, mais n'y va pas avant que je te fasse signe. C'est rue Mouffetard. Je ne connais pas le numéro. Elle occupe un entresol au-dessus d'une boulangerie, presque au coin de la rue Saint-Médard.

— Je vous remercie.

— De rien. Tu restes au bureau ?

— J'en ai bien pour deux ou trois heures à rédiger ce sacré rapport.

Maigret ne s'était pas trompé et il en ressentait une certaine satisfaction en même temps qu'une pointe de tristesse. Il sortit de son bureau, gravit un escalier, entra au service des fiches où travaillaient des hommes en blouse grise.

— Qui s'occupe des empreintes du mort du bois de Boulogne ?

— Moi, monsieur le commissaire.

— Tu as trouvé ?

— À l'instant.

— Cuendet ?

— Oui.

— Je te remercie.

Presque guilleret, maintenant, il franchissait d'autres couloirs et atteignait les combles du Palais de Justice. Dans les locaux de l'Identité Judiciaire, il retrouvait son vieil ami Moers penché, lui aussi, sur des papiers. On n'avait jamais accumulé autant de paperasses que depuis six mois. Jadis, certes, le travail administratif était assez important, mais Maigret avait calculé que, depuis peu, il prenait à peu près quatre-vingts pour cent du temps des policiers de tous les services.

— On t'a apporté les vêtements ?

— Le type du bois de Boulogne ?

— Oui.

Moers désignait deux de ses collaborateurs qui agitaient de grands sacs de papier dans lesquels les vêtements du mort avaient été enfermés. C'était la routine, la première opération technique. Il s'agissait de recueillir les poussières de toutes sortes et de les analyser ensuite, ce qui apportait parfois des indications précieuses, sur la profession d'un inconnu, par exemple, ou sur l'endroit où il avait l'habitude de vivre, parfois sur le lieu où le crime avait été réellement commis.

— Les poches ?

— Rien. Pas de montre, de portefeuille, de clés. Pas même un mouchoir. Ce qu'on appelle rien.

— Et les marques sur le linge et les vêtements ?

— Elles n'ont été ni arrachées, ni décousues. J'ai noté le nom du tailleur. Vous le voulez ?

— Pas maintenant. L'homme est identifié.

— Qui est-ce ?

— Une vieille connaissance à moi, un certain Cuendet.

— Un malfaiteur ?

— Un homme tranquille, le plus tranquille, sans doute, des cambrioleurs.

— Vous croyez que c'est un complice qui a fait le coup ?

— Cuendet n'a jamais eu de complices.

— Pourquoi a-t-il été tué ?

— C'est bien ce que je me demande.

Ici aussi, on travaillait à la lumière artificielle, comme, aujourd'hui, dans la plupart des bureaux de Paris. Le ciel était couleur d'acier et, dans les rues, la chaussée si noire qu'elle semblait couverte d'une couche de glace.

Les gens marchaient vite, collés aux maisons, le visage précédé d'un petit nuage de vapeur.

Maigret retrouvait ses inspecteurs. Deux ou trois téléphonaient ; la plupart écrivaient, eux aussi.

— Rien de neuf, Lucas ?

— On cherche toujours le vieux Fernand. Quelqu'un croit l'avoir aperçu à Paris il y a trois semaines, mais ne peut rien affirmer.

Un cheval de retour. Dix ans plus tôt, ce Fernand, dont on n'avait jamais connu l'identité exacte, faisait partie d'une bande qui avait commis, en quelques mois, un nombre impressionnant de hold-up.

On avait arrêté la bande entière et le procès avait duré près de deux ans. Le chef était mort en prison, de tuberculose. Quelques complices restaient sous les verrous, mais on en arrivait à la période où, par le jeu des remises de peine, on les relâchait l'un après l'autre.

Maigret n'en avait pas parlé tout à l'heure au substitut affolé par la « recrudescence de criminalité ». Il avait son idée. Certains détails des récents hold-up lui faisaient croire que des anciens étaient dans le coup, avaient sans doute reformé une nouvelle bande.

Il suffirait d'en retrouver un. Et, pour cela, tous les hommes disponibles travaillaient patiemment depuis près de trois mois.

Les recherches avaient fini par se concentrer sur Fernand. Il y avait un an qu'il avait été remis en liberté et, depuis six mois, on avait perdu sa trace.

— Sa femme ?

— Elle jure toujours qu'elle ne l'a pas revu. Les voisins confirment ses dires. Personne n'a aperçu Fernand dans le quartier.

— Continuez, mes enfants... Si on me demande... Si quelqu'un du Parquet me demande...

Il hésitait.

— Dites que je suis allé prendre un verre. Dites n'importe quoi...

On n'allait quand même pas l'empêcher de s'occuper d'un homme qu'il connaissait depuis trente ans et qui était presque un ami.




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